La médecine et les médecins en Islam

Dr. Hassan Amdouni

 

Au Nom de Dieu, Le Très Clément par essence, Le Très Miséricordieux par excellence 

Louange à Allâh. Nous Le louons, nous Lui demandons secours, nous implorons Son pardon, et nous cherchons protection auprès d’Allâh contre les vices de nos âmes et les conséquences néfastes de nos actions. Quiconque Allâh guide nul ne l’égare, et quiconque Allâh égare, nul le guide. J’atteste qu’il n’y a pas de Dieu sinon Allâh Seul sans associé, et j’atteste que Mouhammad est Son serviteur et Messager. Que Les Prières et les Salutations multipliées d’Allâh soient sur lui, sur sa famille, ses nobles Compagnons, ainsi que tous ceux qui ont suivi leur voie, ave excellence, jusqu’au Jour du Jugement. 

L’Islam a placé l’homme au centre de ses préoccupations. Tous les Textes de la Loi de Dieu (Exalté) : Coran et Sounna, s’adressent à l’homme et se préoccupent essentiellement de lui  et de sa sauvegarde dans ce monde et dans l’autre.

L’homme avec sa dualité corps et âme est au centre de la Révélation et du message du prophète Mouhammad (Paix et Salut d’Allâh sur lui).

(Voir : Dr Saïd Ramadan al Bouti : La civilisation humaine à la lumière du Coran, chapitre : la conception de l’Homme d’après le Coran. Edition Dâr al Fikr.)

L’importance accordée à sa santé morale, mentale, physique et son hygiène de vie (soins du corps : par le ghousl, les ablutions, les sounan al fitra : la circoncision, l’hygiène buccale, le fait de couper les ongles, la taille de la moustache, se raser ou couper les poils sous les aisselles et du pubis) ; le lavage  après les rapports sexuels, après le cycle menstruel ; le lavage du vendredi, etc.…

Les cinq universaux (al koulliyyât al khams), qui sont considérés comme étant les fondements de la législation islamique, à savoir: la préservation de la foi, la préservation de la vie, de la raison, des biens privés et de la filiation, sont toutes des indications formelles sur l’importance accordée à la vie et à la santé de l’homme. On peut y ajouter la prise en considération des situations de nécessité vitale (addaroûrât) qui, dans certains cas, accorde la priorité à la préservation de la vie et de la raison sur la préservation de la foi et de la religion.

Le noble Coran a indiqué les bases des remèdes auxquelles, il faudra recourir pour se faire  soigner.

Ces règles ou ces bases sont mentionnées sous la forme de trois fondements : la préservation de la santé par le respect des règles d’hygiène; la prévention de toute chose nuisible ; l’éradication de la nuisance et de tout ce qui peut causer préjudice à l’homme.

Je rappelle par l’occasion, une règle de base du Droit musulman : Dar’ al mafsada mouqaddamon ‘alâ jalbi al maslahati : le fait de repousser le dommage est prioritaire par rapport à la recherche de ce qui est utile.

De même, lorsqu’on parcourt la Sounna du Prophète (Bénédictions et Salut de Dieu sur lui), on y trouve des indications évidentes sur ces diffé­rents domaines de la médecine : les maladies physiques, les maladies mentales et psychologiques. Il est (Bénédictions et Paix de Dieu sur lui) le médecin du corps et de l’âme. C’est lui qui a dit : « A chaque maladie Dieu a fait descendre un remède (une guérison). » (Rapporté par Al Boukhârî et Mouslim)

Ousâma Ibn Chourayk a rapporté ceci : «Je suis venu à la rencontre du Messager de Dieu. Ses Compagnons se tenaient immobiles tels des perchoirs sur lesquels se tenaient sans crainte les oiseaux, je l’ai salué, puis m’assis. Quand les délégations de bédouins arrivèrent, ils com­mencèrent à le questionner. Certains lui demandèrent : « Ô Messager de Dieu ! Doit-on se soigner? » Il leur répondit: « Soignez-vous, car à toute maladie Dieu a fait descendre un remède, excepté une seule maladie : la maladie de la vieillesse].» (Rapporté par les Sounan)

Il a dit également (Paix et Salut de Dieu sur lui) : « Demandez à Dieu pour qu’Il vous accorde la bonne santé dans ce bas-monde, et la préservation dans l’Au-delà ! »(Rapporté par Ibn Mâjah)

Et il a dit encore (Paix et Salut sur lui) : « Ton corps a également des droits sur toi … » (Rapporté par Al Boukhârî)

Le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) indiqua aux Musulmans une hygiène de vie constante et sans faille. Ces indications prophétiques les ont poussées, très tôt, à investir le monde médical et de la pharmacologie.

La médecine était l’une des sciences les plus cultivées par la civilisation arabo-musulmane, et dans laquelle les Musulmans avaient réalisé les progrès les plus spectaculaires. Leurs œuvres étaient les références mondiales en la matière.

Citons notamment l’ouvrage Ibn Abî Ousaybi‘a ayant réservé un livre volumineux à l’histoire des médecins musulmans intitulé: « ‘Ouyoûn al Atibbâ’ wal houkamâ’ ».

L’imâm Ibn Al Qayyim et l’imâm As-Souyoûtî (Paix à leurs âmes) ont exploré cette médecine prophétique, et ils ont essayé, chacun à son époque, d’y apporter un éclairage et une certaine explication.

« Un jour, raconte Aboû Ad-Dardâ’, je dis à l’Envoyé de Dieu (Paix et Salut de Dieu sur lui) : « Ô Prophète de Dieu, être en santé et en remercier Dieu me plaît bien mieux que d’avoir l’épreuve de la souffrance et de me résigner. « ­Je suis de tonavis, me répondit le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui), Ton Messager aime, comme toi la bonne santé.» (Sahîh)

« Qui est sain de corpsdisait, le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui), tranquille dans son intérieur, tranquille pour le pain de sa journée, est comme s’il avait le monde sous sa main.» (Rapporté par Al Boukhârî dans al adab al moufrad, Ibn Mâjah, AtTabarânî, Al Hâkim, At-Tirmidhî ,qui l’a jugé hasan)

Le premier des bienfaits célestes dont il sera parlé au serviteur de Dieu le Jour de la résurrection, lui sera rappelé par ces termes : « Ne t’ai-Je pas donné un corps sain, et ne t’ai-Je pas donné pour breuvage l’eau fraîche? » (As-Souyoûti)

Il recommandait (Paix sur lui) aux Musulmans : « Demandez à Dieu la certitude et la santé. Nul, certainement, n’a jamais rien reçu, après la certitude, de plus précieux que la santé. Elle est le bienfait que Dieu (Exalté) aime, par-dessus tout, qu’on Lui demande.» (Rapporté par Ahmad et la deuxième partie fait partie d’un hadîth rapporté par At-Tirmidhî)

Le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) a, dans le sens de ce que nous venons d’exposer, proclamé une parabole que voici :
« Les exemples de guidance et du savoir avec lesquels Allâh m’a envoyé, sont comme une pluie abondante tombant sur la terre : de cette terre, une portion est un limon fertile qui absorbe l’eau de pluie et fait naître une abondance de végétation et d’herbage ; une autre portion est une terre, dure, retient l(eau de pluie qui, grâce à Dieu, est bonne pour les gens qui l’utilisent pour boire, pour faire boire leurs bestiaux et pour irriguer leurs terres ; une autre portion est aride, ne peut retenir l’eau, ni donner de la végétation. Voilà les exemples de la personne qui comprend la religion de Dieu, tire bénéfice du savoir, que Dieu (Exalté) a révélé par mon intermédiaire, l’apprend puis l’enseigne aux autres ainsi, que, en dernier, l’exemple de celui qui n’a pas relevé la tête (de l’égarement et de l’ignorance), et n’accepte pas la guidance de Dieu, telle qu’elle m’a été révélée. »  (Rapporté par Al Boukhârî)

Labîd, le poète, a dit : « L’homme, même de noble nature, ne sait pas se corriger par lui-même ; l’homme se corrige par l’œuvre d’un autre qui est homme de bien.»

C’est encore à Labîd qu’appartient cette sagesse : « Certes, toute chose, excepté Dieu, a le mal en soi même.»
Ainsi le médecin est, quelque part cette personne qui corrige par son œuvre les autres. Car la science «La science est double: science des corps, et science de la religion (scien­ce physique et science religieuse) ».

Ces paroles attribuées par quelques savants du hadîth au Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui), sont, en vérité, de l’imâm Ach-Châfi‘î. Mais d’après AtToû‘î qui s’appuie de l’autorité de Rabî‘, montre l’importance et le rôle des médecins.

Le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) a dit : « Deux sortes de savants sont indispensables parmi les hommes : les ‘oulamâ’ pour la science religieuse, les médecins pour la science ayant trait au corps. Ils doivent avoir des principes qui soient solides, une conduite qui soit attentive et des devoirs sacrés qui soient consciencieux.»
L’Islam demande, donc, à ses fidèles de faire appel aux médecins. Le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) envoya chercher un médecin pour Oubay Ibn Kâ‘b (Que Dieu soit satisfait de lui) blessé à Ouhoud. Le médecin lui ouvrit une veine, puis lui appliqua une cautérisation. (hadith Sahîh)
«Lors de la bataille d’Ouhoud, raconte Aboû Hourayra, un individu des Ansârs, partisans dévoués de la foi nouvelle, eût une blessure pénétrante aux flancs. Le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) appela deux médecins qui étaient à Médine et leur dit : « Soignez et traitez cet homme. »  -«Prophète de Dieu, demandèrent-ils, y a-t-il donc avantage à traiter un malade? »  -« Oui, sans nul doute ! » (Mouslim, Aboû Dâwoûd, Ibn Mâjah, Ahmad et Al Hâkim )
Le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) alla chez un malade pour le visiter, et le voyant ainsi, dit aux gens présents : « Allez m’appeler un médecin.» « C’est toi, Prophète de Dieu, reprend un des assistants, c’est toi qui donnes ce conseil ? »- « Certainement !» (Ahmad, la chaîne est composée de rapporteurs honorables)
Un individu fut blessé, cela a eu pour conséquence un épan­chement de sang qui se répandit dans les tissus. Le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) appela alors deux hommes de la tribu des Banoû Anmâr. Ils arrivèrent : « Lequel de vous deuxleur demanda le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui), est le plus médecin ?» –«Mais, reprit l’un d’eux, y a-t-il donc avantage réel à traiter un malade ? » Alors, le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) répondit : « Celui qui a envoyé ici-bas la maladie, en a aussi envoyé le remède.» (Rapporté par Mâlik dans son Mouwatta’)
L’imâm Ach-Châfi‘î (Paix à son âme) a dit : « Après la science qui distingue ce qui est illicite et ce qui est licite, défendu ou permis (al fiqh : le Droit), je ne connais pas une science plus noble que la médecine.» Ach-Châfi‘î s’inquiétait que les Musulmans négligeaient la médecine. « Les Musulmans se sont faits dépasser par les juifs et les chrétiens », disait-il à son époque !
Selon l’Islam, le médecin habile recourt à tous les moyens licites, pour revivifier la force du malade. Il la rappelle tantôt par les aliments, tantôt par les émotions de satisfaction et de joie, tantôt par l’espérance, tantôt par le fait de faire peur aux malades en leur rappelant les conséquences néfastes de certains comportements ou agissements.

Le médecin ne fait pas appel uniquement à la médication composée, mais recourt aussi à la médecine religieuse (divine : attibb al ilâhî). Comme par exemple la prière. Il est attesté que la prière réunit plusieurs vertus efficaces, puisqu’elle éveille chez le fidèle les dimensions de crainte, d’appréhension, d’espé­rance, d’humilité, d’amour, … ce qu’il faut pour réconforter le patient et lui réjouir le cœur. De telle manière, la maladie est éliminée.

On a l’exemple d’un jeune homme qui avait une plaie, et qui ne voulait point se soumettre à l’instrument tran­chant. Sa famille attendit que le patient se fût mis en prière ; alors on le prit et on l’opéra ; il ne s’aperçut et ne se plaignit de rien, tant il était profondément plongé dans sa prière.

La médecine n’est pas uniquement porté sur le corps :

Car les maladies sont aussi des maladies psychiques et psychosomatiques.

-C’est ce qu’on appelle la relation du physique et du psychique, et cela fait que l’Islam considère qu’en premier lieu, « Le meilleur des médicaments, c’est le Coran.»

Dieu (Exalté) Lui-même a révélé ces mots : « Il est, en ce Coran, venant de Nous, flux de guérison et grâce pour les croyants, mais aussi perdi­tion accrue pour les impies. »(Ste 17 /V 82)

C’est-à-dire, ce que Nous envoyons du Coran n’est pas tout entier pour guérir les maladies des hommes. Ou bien encore, de même qu’il guérit les maladies du corps lorsqu’on s’en sert dans ce but, de même aussi il gué­rit de l’erreur, de l’ignorance, du doute et de l’incertitude et il dirige pour sortir de l’égarement.

Le Coran est donc la guérison des cœurs en y faisant cesser l’ignorance, et la guérison des corps en y faisant cesser les maladies.
C’est pour cette raison que les médecins musulmans disent : le traitement du corps dépend de la pureté du cœur. Ayez le cœur pur, vous aurez le corps sain.

« Il y a dans le corps,a dit le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui), un morceau de chair (le cœur) qui, s’il est pur, fait que tout le corps est sain.» (Rapporté par Ahmad)

-La prière a aussi des effets matériels salutaires. Elle donne le conten­tement intérieur et le bien être du corps, car elle réunit dans son exé­cution des positions et poses diverses telles que se mettre débout, s’incliner, se prosterner, se tenir en repos, se ramasser, la déclaration de l’Unité divine, les formules d’adoration, les mouvements ou actes d’humilité, d’humiliation devant Dieu (Le Très Haut), etc. toutes circonstances qui exigent le jeu des articulations. Par la manœuvre de la prière, s’assou­plissent la plupart des organes, surtout l’estomac, les intestins et, par suite, s’opère ce dont le secours est le plus efficace pour éliminer les deux déjections (l’urine et le stercoral), et conduire les aliments hors de l’estomac.

« J’ai vu, a dit le célèbre médecin ‘Abd Al-Latîf, nombre d’indivi­dus vivant dans l’oisiveté et la bonne chère et conservant cependant une excellente santé. J’ai recherché quelle en pouvait être la cause, et j’ai trouvé que ces individus priaient beaucoup, passaient presque toute la durée des nuits en prières.» Ceci amena

‘Abd Al-Latîf à des considérations et réflexions qu’il exprime ainsi : « Et effet, combien est utile la prosternation à celui qui a une fluxion, un coryza  (catarrhe)! De quel puissant secours est la prosternation pour dégager les fosses nasales embarrassées ! De quel secours est la prosternation pour expulser les deux grosses sécrétions, pour faire descendre les aliments de l’estomac et des intestins, pour donner mouvement aux fèces qui y sont amassés et les évacuer, lorsqu’ils encombrent, lorsqu’ils gênent des vaisseaux et s’entassent les unes sur les autres ! La prière laisse aussi la satisfaction dans l’âme, dissipe les soucis ; elle éteint le feu de la colère ; elle conduit à s’humilier devant la Vérité éternelle, à se tenir modeste devant les hommes ; elle adoucit le cœur, incite au pardon, éloigne de la ven­geance.

Souvent aussi la prière fait trouver les vues sages, les combinaisons rationnelles, les réponses appropriées et péremptoires, rappelle au fidèle ce qu’il a oublié, et alors il réfléchit sur ce qu’il a à rechercher ou à éviter pour ses affaires, pour la conduite de sa vie ici-bas et en vue de l’autre monde, pour l’acquisition des bonnes œuvres. Et tout cela se produit surtout quand se prolonge la position debout et quand on est dans la nuit, alors que les yeux vont s’appesantir de sommeil, que les bruits se calment, que les puissances inférieures baissent et que leurs êtres s’abritent, que les puissances du monde des esprits se développent et prennent espace, que leurs voiles s’ouvrent et s’étalent. »

C’est aux effets de la prière que le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) a fait allusion quand il a dit à Bilâl (qui annonçait la prière et y appelait les fidèles) : « Fais que nous nous reposions et nous nous calmions par la prière, ô Bilâl. Annonce-la, que nous priions ; cela nous reposera et nous calmera.» (Ahmad et Aboû Dâwoûd)

Et puis ces autres paroles du Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) : « J’ai mis dans la prière mon bonheur ; et le rafraîchissement de mes yeux. Grâce à ce qu’elle procure de joie et de bien-être dans l’âme, grâce aux avantages qu’elle donne pour ce monde et pour l’autre.» (As-Souyoûti )

Le Prophète (Paix et Salut de Dieu sur lui) a mis sa plus grande félicité à prier. Il a dit encore : « Par les prières, faites dissoudre vos aliments. » (As-Souyoûti : al Jâmi ‘)

On raconte que Dhoû An-Noûn passa un jour près d’un médecin autour duquel étaient bon nombre de personnes, hommes et fem­mes, qui tenaient en mains des fioles contenant une eau. Il exposait à chaque personne ce qu’il convenait le mieux de faire pour la maladie qu’elle avait : « Or, a dit Dhoû An-Noûn (savant et ascète), je m’approchai du médecin ; je le saluai et il me rendit mon salut ; puis je lui adressai ces paroles :

-«Que Dieu te donne Sa Miséricorde! Trouve-moi un remède contre les fautes et les péchés.»

Le docteur baissa un moment la tête, puis la releva, et il me dit :
-«Si je te formule une prescription, tu y feras attention, et tu comprendras ma pensée ? »

-« Je l’espère »
-«Très bien. Prends des racines de pauvreté avec le cresson de la patience, avec le myrobalan de l’humilité, avec l’emblic de l’humi­liation sainte, avec la muscade de la soumission devant Dieu, avec le polypode de la crainte de Dieu, avec la rhubarbe de la pureté, et avec l’agaric de la bonne foi. Jette-le tout dans la marmite de la confiance en Dieu. Allume par-dessous le feu de l’Amour divin, et entretiens ce feu jusqu’à ce que s’amasse en écume la crème de la sagesse. Une fois que la crème de la sapience est formée, décante sur le tamis des prières et dévotions, verse ensuite dans la coupe de la résignation, évente alors jusqu’à rafraîchissement avec l’éventail de la glorification de Dieu. Quand cela est rafraîchi, bois-le. Puis, rince-toi la bouche avec la modération et la tempérance. Dès lors, jamais plus tu ne reviendras aux actions nuisibles.»

Qui ne pense pas à sa destinée et demeure ignorant de ce que doivent être ses espérances, n’arrivera point par ses œuvres au degré d’homme vertueux : c’est là une des qualités primordiales du médecin musulman.

En résumé, traitez votre cœur par les médications religieuses et morales, tout comme vous traitez votre corps et celui de vos patients par des médicaments de la médecine ; et vous obtiendrez et vous donnerez aux autres la possibilité d’obtenir le bien être total dans ce monde et dans l’autre.

Un médecin performant selon l’Islam est quelqu’un de compétent et d‘honorable. (‘adl). L’honorabilité (al ‘adâla) est une qualité omniprésente dans la pratique de la médecine selon l’Islam. C’est ce qu’on appelle « al âdâb ».

Très tôt les savants médecins ont accordé une grande importance à ce que l’on appelle dans le langage contemporain « les règles de la déontologie médicale.

On trouve ces indications parsemées dans les libres du fiqh et les livres d’étique (tazkiyat an-nafs).

Très tôt, en s’inspirant des préceptes prophétiques on a mis sur pied les règles de la déontologie médicale. Au 9ème siècle Ishâq Ibn ‘Alî Ar-Rouhâwî a écrit le premier dans ce sujet, un livre qu’il a intitulé : Âdâb AtTabîb (les règles morales et éthique du médecin).

On appelait le médecin : al hakîm (le sage), car c’est un individu sensé agir avec sagesse et modération, et être un repère pour le malade, qui peut parfois être désorienté et en état de panique. Pour pouvoir assumer cette tâche, le médecin musulman se ressource dans sa foi et dans sa relation avec Dieu. Nous avons l’exemple d’Ibn Al Jazzâr, éminent médecin du 9 siècle, auteur du premier ouvrage de pédiatrie (Siyâst assibyân wa tadbîrihim), et d’ouvrage de médecine vulgarisé pour la masse, tel que son ouvrage : Tibb al fouqarâ’, et Zâd al Mousâfir.

Ibn Al Jazzâr avait l’habitude de se retirer dans le ribat de Monastir pour al mourâbata et pour s’adonner aux veillées spirituelles (prière et récitation du Coran et évocation de Dieu (Exalté), durant un mois, une fois par an. Il était juste, équitable et  craignait Dieu dans sa mission. Il refusait les inégalités dans l’accueil de ses malades et leur traitement.

J’aimerais apporter une information médicale importante, c’est qu’Ibn Al Jazzâr a été le premier, après le Prophète (Paix sur lui) à s’intéresser à l’hygiène buccale, puisqu’il avait découvert une poudre pour se brosser les dents, déjà au 3ème siècle de l’Hégire/9ème siècle AJC. Quant au Prophète (Paix sur lui), il est l’inventeur de la brosse à dents et des premiers soins pour l’hygiène buccale : le siwâk à l’arak.
L’Islam allie l’éthique à toute activité sociale, que dire lorsqu’il s’agit d’un domaine où le médecin fait intrusion dans l’intimité de la personne, à savoir son corps et ses pensées.  Ainsi la déontologie médicale a été toujours omniprésente dans la médecine musulmane. Elle a été confirmée lors do Colloque international de la médecine musulmane tenue au Koweit en janvier 1981. Les médecins musulmans et les juristes ont ensemble confirmé et rédigé cette charte du médecin musulman : connu sous le nom : Code islamique de l’éthique médicale.

En voici le texte du serment :

Je jure au Nom de Dieu, Le Très Haut :

-De préserver la conscience de Dieu dans l’exercice de ma profession ;

-De protéger la vie humaine dans toues ses étapes et dans toutes les circonstanciés en faisant tout mon possible pour la sauver de la mort, de l’affliction et de l’anxiété ;

-De préserver la dignité des gens, de protéger leur vie privée et de ne pas divulguer leurs secrets ;

-D’être toujours, un instrument et l’expression de la Miséricorde divine, étendant mon soutien médical au proche et à l’éloigné, au vertueux comme au pécheur, à l’ami et à l’ennemi ;

-De m’engager à acquérir des connaissances médicales et autres et à les exploiter pour le bien de l’humanité et jamais pour semer le désordre sur terre ;

-De respecter mon maître, d’enseigner au plus jeune et d’être le frère des membres de la profession médicale unis dans la piété et dans la charité ;

-De vivre ma foi en privé et en public en évitant tout ce qui peut ternir ma personne aux « Yeux de Dieu » (Exalté), de Son Messager (Paix sur lui) et des fidèles.

Que Dieu en soit témoin !»

(Vous pouvez avoir accès au texte entier du serment en anglais et en arabe sur le site :(www.islamset.org/ethics/code/index.html)

Pour conclure je vous lis les recommandations faites par l’imâm As-Souyoûti aux médecins musulmans il y a plus de 5 siècles : « Le médecin doit avoir la crainte de Dieu, le sentiment religieux, la sagesse des conseils, le respect des secrets de ses malades. Il ne doit jamais donner le médicament pour causer ou hâter la mort, ni en indiquer, ni en faire connaître, ni jamais prescrire de médicaments abortifs. Que sa conscience l’éloigne de toute impureté, de tout acte coupable ; qu’il ne porte jamais ses regards sur un ou une malade dans une mauvaise intention ; qu’il ne se laisse point dominer et préoccuper par des pensées de plaisir ou de caresse ou d’agacements ou d’amusements. Qu’il aime et soit toujours prêt à bien traiter les pauvres; qu’il soit simple dans sa demeure ; qu’il com­mande sévèrement sa langue, qu’il ait la parole bienveillante ; qu’il soit toujours rapproché de Dieu (Exalté).»

 

Que Dieu comble de Ses Grâces et de Ses Faveurs Son serviteur et Messager Mouhammad, sa famille  ainsi que tous ses Compagnons et tous ceux qui ont suivi sa voie jusqu’au Jour de la Rétribution.

 

Références bibliographiques utiles :

-Ahmad Jamil, Ach-har Hakim : Unani. LA médecine gréco-arabe. Guy Trédaniel. Paris 1999

-Ammar Sleim : Médecins et médecine de l’Islam
Tougui. Paris 1984

-Ben Milad ahmed : L’école médicale de Kairoun aux 9ème-11ème siècles. Paris. Edit Jouve et Compagnie. 1933

-Chérif Ahmed : Histoire de la médecine arabe en Tunisie. Thèse de Doctorat. Bordeaux. 1908

-Guyot Jean Claude et Al : Islam et santé. Anthropologie, médecine, psychiatrie, sociologie. Maison des sciences de l’Homme d’Aquitaine. Bordeaux. 1993

-Houdas Yvon : La médecine arabe aux siècles d’or : 7ème-13ème  siècles. L’Harmattan. Paris 2003

-Institut du Monde Arabe : A l’ombre d’Avicenne. AL médecine au temps des Califes. Paris/Gand 1996

-Jacquart Danielle et Micheau Fraçoise : La médecine arabe et l’Occident médiéval. Maisonneuve et Larose. Paris 1996

-Mazliak Paul : Avicenne et Averroès. Médecine et biologie dans la civilisation de l’Islam. Vuibert/Adapt. Paris 2004.

-Moulin Anne-Marie : Histoire de la médecine arabe : dialogue du passé avec le présent. Confluent. Paris 1996

-Sournia Jean-Charles : Médecins arabes anciens (10ème-11ème siècles. CILF, Paris 1986.

-Ulmann Manfred : La médecine islamique. PUF, « collection : islamique). Paris 1995.

-Lombard Maurice : L’Islam dans sa première grandeur : 8ème- 11ème siècles. Flammarion. Paris. 1971.

 

Références anciennes

-Ibn Al Baytâr ‘Abd-Allâh : Traités des simples . traduction Lucien Leclere. Institut du Monde arabe. Paris 1987. 3 volumes.
-Ibn Al Jazzâr al qayrawânî : Siyâsat assibyâni wa tadbîrihim. Eclairés par dr Habîb all Hîla ; Maktabat al Manâr. Tunis. 1968

-Ibn Al Qayyim Chams Ad-Dîn : La médecine prophétique : AtTibb An-nabawî. (Paix sur lui).

-Ibn Abî Ousaybi ‘a : ‘Ouyoûn  al anbâ’ fî tabaqâti al atibbâ’. Beurouth. Dâr maktabat al hayât. 2 volumes

-Ibn Jouljoul : Tabaqât al atibbâ’ wal houkama’. Le Caire. Imprimerie de l’Institut français d’archéologie orientale. 1955. 1 volume

-As-Souyoûtî Jalâl Ad-Dîn : La médecine du Prophète (Paix sur lui).

-Ibn Khalsoûn Mouhammad : Le livre des aliments : kitâb al aghdiya. Traduction Suzanne Gigandet. Institut français d’études arabes de Damas. 1996

-Râzî Mouhammad : Guide du médecin nomade. Sinbad, Arles. 1980.

 

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Author: admin-amdouni